Virtual Leadership : comment adopter un management de proximité à distance ?
Maintenir une bonne connexion avec son équipe en télétravail dépend de sa propre attitude. Voici 4 nouveaux paradigmes pour un management virtuel positif.
Par « management à distance », on entend généralement aujourd’hui la gestion tout en étant séparé spatialement des membres de notre équipe. C’est précisément lorsque nous sommes séparés physiquement qu’une proximité humaine et un sentiment d’appartenance sont particulièrement nécessaires. De même qu’une connexion internet se doit d’être stable afin que nous puissions nous « skyper » ou nous « zoomer », une relation stable et l’établissement de liens entre nous sont nécessaires pour assurer une réussite commune.
Ancien paradigme : « Dirige de manière dominante et entoure-toi de disciples »
Nouveau paradigme : « Dirige avec humanité et forme les gens à (se) diriger eux-mêmes »
Cette année, nous sommes amenés à adopter cette façon d’agir à une vitesse folle. Les questions qui se posent dans ce contexte sont les suivantes : « Sommes-nous seulement distants physiquement ou également d’un point de vue humain ? », « À quel point suis-je proche de mes collaborateurs, de mes collègues et même de mes clients ? » Ce sont les réponses à ces questions qui nous mènent vers ce nouveau paradigme.
Au plus tard après les premiers mois d’obligation de télétravailler, il devient clair pour nombre d’entre nous que nous devons être connectés au niveau de l’humain afin de pouvoir être heureux en tant qu’être humain et, du point de vue de l’entreprise, de réussir.
En tant que partenaire de IN.flow, j’ai pu travailler d’avril à mai sur un projet avec Promotion Santé Suisse visant à soutenir les personnes en télétravail. Le résultat du sondage auprès des clients était sans équivoque : la connexion avec son équipe constitue le plus grand besoin et, par conséquent, le sentiment de communauté est celui qui manque le plus.
Diriger dans un monde dans lequel les choses deviennent de plus en plus incertaines et fluides, dans un monde VUCA (1), exige de nos relations qu’elles soient encore plus fiables. Un cadre sûr, donc, qui permet de survivre ensemble dans un monde incertain. Il faut pour cela adopter un style de leadership qui encourage les autres à se prendre en charge et à se considérer comme membre précieux d’un tout.
Un leader est celle ou celui qui aspire à inviter, inspirer et encourager les autres à prendre de nouveaux chemins et à développer leurs propres potentiels. Cela n’a rien à voir avec un statut ou un pouvoir formel. C’est grâce à une construction savante des relations et de la culture d’entreprise que des équipes soudées et fructueuses peuvent voir le jour. Que ce soit en virtuel ou pas.
Ancien paradigme : « Attends qu’on te demande de prendre un rôle de leader »
Nouveau paradigme : « Dirige où que tu sois – trouve des responsabilités et prends-les »
Dernièrement, alors que j’étais à la recherche d’un bon classique pour ma soirée du vendredi, je suis retombé sur le film « Wall Street ». Dans celui-ci, Michael Douglas, qui incarne « Gordon Gekko », occupe un bureau de direction se trouvant probablement au 120ème étage d’un building de Manhattan. Il incarne ainsi le manager couronné de succès. Et les autres aspirent à devenir comme lui. Il est juste assis à son bureau, tout là-haut, et il a réussi. Ce qui compte, ce n’est que le succès. L’être humain n’est important que s’il sert au système et contribue à emmener la machine (2) vers de nouveaux exploits et à lui faire générer de nouveaux bénéfices. Sinon, il est remplaçable. Une image à des années-lumière de ce à quoi le leadership devrait ressembler…
Cette image est-elle si loin de notre réalité d’aujourd’hui ? Un tel modèle vieillot de leadership qui découle de l’idée de l’Etat idéal de Platon n’est-il pas encore toujours très présent dans notre société. Ce modèle peut être résumé comme suit : une élite minoritaire prend toutes les décisions. Un « management de seconde ligne » reçoit ensuite « d’en haut » les ordres à appliquer. Cette strate « intermédiaire » fait alors exécuter les mesures par « les gens du commun ».
À l’époque, il n’était pas envisageable de ne pas avoir de strates. Mais aujourd’hui, le système est plus perméable. On peut « monter les échelons » et prendre un rôle de cadre. Mais ce n’est pas pour autant que la dynamique de haut en bas change.
Dans mon activité auprès des entreprises, je vois malheureusement encore trop souvent ce modèle de management archaïque de Platon. Il est solidement ancré dans notre système et c’est pourquoi ce concept vieillot de management est si difficile à déloger.
La science s’est depuis longtemps mise d’accord qu’un management fructueux et durable ressemble totalement à autre chose (3). Pour prospérer, les organisations nécessitent de la proximité entre les employés et les cadres. Elles ont besoin de dirigeants authentiques, qui font preuve d’assurance et insufflent de la confiance. Elles ont besoin de personnes qui sont encouragées à prendre des responsabilités à leur échelle. C’est une telle culture d’entreprise et de management qui permet l’innovation, le développement personnel et la croissance.
Afin de créer de la proximité à distance, une confiance dans les intentions fondamentalement positives des employés est nécessaire (4). Un management axé sur la « carotte et le bâton » n’a de place qu’enfermé à double tour dans un coffre sur lequel est écrit : « Vieilleries, ne pas ouvrir ! ». Nous ne pouvons aujourd’hui concevoir un management comme celui en place il y a 30, 50 ou même 100 ans. Que ce soit virtuellement ou pas.
Ancien paradigme : « Commettre une erreur signifie l’élimination »
Nouveau paradigme : « Commettre une erreur et en parler ouvertement signifie s’impliquer »
Dans les entreprises qui ont une vision d’avenir, leur management adopte une attitude axée sur les personnes et une image de l’être humain qui suppose que les personnes sont fondamentalement bonnes (5).
Les êtres humains font des erreurs et lorsque règne, dans une organisation, une atmosphère permissive qui accepte les erreurs et les considère comme source d’apprentissage pour une équipe, alors développement et nouveauté ont également leur place. L’innovation se fait rarement d’un claquement de doigts. Lorsque les erreurs sont dissimulées, c’est le signe évident d’une culture de la peur. Il existe suffisamment d’insécurité à notre époque. Si nous devons également avoir peur au sein de l’entreprise, ce n’est pas seulement néfaste pour l’individu, mais également pour l’équipe et pour l’entreprise. Plus encore, cela porte hautement préjudice aux activités commerciales et empêche toute innovation.
Ces dernières années, beaucoup de choses se sont améliorées. Un cadre est plus susceptible de venir au bureau en baskets et en jeans ou de se présenter ainsi à l’écran en télétravail. Mais cela n’a pas pour autant forcément entraîné un changement de culture. Ce qui est bien, c’est quand cette façon plus informelle de s’habiller représente également quelque chose de plus profond : « nous sommes souples, nous sommes en premier lieu des êtres humains et nous sommes sur un pied d’égalité ». C’est surtout dans les entreprises informatiques et les startups que j’observe de plus en plus et avec grand plaisir cette façon d’appréhender les relations professionnelles.
Il est aujourd’hui devenu crucial, que ce soit dans des équipes virtuelles ou dans des bureaux partagés, de communiquer de manière ouverte et proactive. Nous abordons les choses qui vont bien et celles qui ne vont pas. Nous nous connaissons en tant que personnes. Nous connaissons nos forces et nos faiblesses dans un contexte professionnel. Les cadres créent un environnement dans lequel les employés peuvent décider et agir de manière autonome et responsable, mais pas indépendamment de l’entreprise. Cela permet de s’assurer que les individus peuvent réagir rapidement et sont prêts à prendre des décisions. Ils peuvent avoir confiance en eux, car ils savent qu’on leur fait confiance pour évaluer les situations avec bon sens et ainsi soit agir directement, soit impliquer les personnes nécessaires pour prendre une décision plus importante.
Ancien paradigme : « Nous sommes en compétition les uns avec les autres pour monter les échelons »
Nouveau paradigme : « Nous sommes là, les uns pour les autres et les uns avec les autres, afin que nous puissions évoluer tous ensemble »
Dans cet article, j’ai parlé des conditions essentielles permettant une proximité réussie à distance ainsi qu’un management virtuel fructueux. J’espère que c’est devenu plus clair qu’il s’agit avant tout d’une attitude intérieure envers les autres. Chacune et chacun connait son rôle dans une équipe. Il n’y a pas de « haut » et de « bas », mais il s’agit plutôt de rendre l’individu apte à remplir son rôle dans l’équipe du mieux qu’il peut afin que l’organisation puisse progresser ensemble, soit productive et que les employés s’y sentent bien.
Références :
- VUCA est l’acronyme de Volatility (volatilité), Uncertainty (incertitude), Complexity (complexité) et Ambiguity (ambiguïté).
- LALOUX, Frédéric. Reinventing organizations : vers des communautés de travail inspirées. Vahlen, 2014.
- SELIGMAN, Martin. Flourish – Wie Menschen aufblühen: die positive Psychologie des gelingenden Lebens. Kösel-Verlag, 2012.
- PADBERG, Ekkehart. Einige Vorannahmen des NLP. In: Management by Excellence. Gabler, 2010. S. 25-29.
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