L’architecture informatique dans le contexte de la transformation digitale
Quelles contraintes la digitalisation impose-t-elle aujourd’hui à l’architecture d’entreprise ? Comment les technologies ont-elles évolué au cours de la transformation digitale ? Markus Schacher, expert en architecture informatique, apporte des réponses dans cet article.
1. Introduction
Il y a environ deux ans, un client est venu me voir et m’a montré une image représentant son architecture informatique. Il m’a alors dit : « là, sur la gauche, ce sont nos applications numériques ». En un éclair, une question m’a traversé l’esprit : « Et là, sur la droite, qu’est-ce que c’est ? ». La digitalisation est un mot très à la mode. Mais qu’est-ce qu’il veut vraiment dire et quelles sont les tâches d’un architecte d’entreprise au temps de la transformation digitale ?
2. Digitalisation
Proprement dite, la digitalisation désigne la transformation de données analogiques (sons, images, grandeurs physiques, etc.) en une forme numérique. Cette conversion des données analogues en données numériques revêt évidemment une importance capitale, mais reste bien trop limitée : en effet, l’utilisation toujours plus globale d’ordinateurs engendre une automatisation toujours plus importante des activités que les êtres humains ont, jusqu’à maintenant, accomplies manuellement. Ainsi, la digitalisation est bien mieux décrite dans la définition suivante :
« La digitalisation est la délégation complète de tâches humaines à des systèmes techniques qui utilisent les technologies de l’information actuelles pour permettre des modèles opérationnels fondamentalement nouveaux. »
La délégation de tâches à des systèmes techniques vise d’une part à améliorer l’efficacité et la qualité d’exécution et d’autre part à décharger autant que possible les êtres humains. Les « Systèmes techniques » désignent ici toute une série de technologies qui rendent la digitalisation possible.
Les technologies de digitalisation
La liste suivante est un simple échantillon des technologies de digitalisation :
- Les technologies permettant la conversion de données analogiques en données digitales et inversement afin de produire de nombreuses répliques d’une origine physique, comme la digitalisation de documents audio ou vidéo
- Les technologies de saisie et de diffusion d’informations, comme les senseurs et balises, les technologies de diffusion de données ainsi que les technologies mobiles et IoT
- Les technologies de stockage et de récupération des informations, comme le stockage cloud et les moteurs de recherche
- Les technologies permettant la combinaison de mondes physiques et numériques, comme les réseaux sociaux, la réalité augmentée (AR) et la réalité virtuelle (VR)
- Les technologies de reconnaissance des formes ainsi que des corrélations associatives et causales, comme les algorithmes d’analyse de données, la Big Data, le Machine Learning ou des réseaux neuronaux entraînés
- Les technologies de prise de décision, comme les systèmes de contrôle ou les réseaux neuronaux entraînés à la prise de décision (mais qui, en tant que boîtes noires, ont de la peine à expliquer leurs décisions)
- Les technologies d’exécution d’actions, comme les API pour guider les systèmes de logiciels ou l’automatisation robotisée des processus (RPA), la robotique et les drones qui ont une influence directe sur le monde réel
- Les technologies de communication avec l’utilisateur, comme les chatbots pour mener une conversation ciblée avec une personne
- La blockchain et les technologies de registre distribué pour rendre l’historique des composants d’avion infalsifiable, par exemple
3. L’architecture
Le concept d’ « architecture » connaît un traitement similaire à celui de « digitalisation ». Mais qu’est-ce qu’on entend par « architecture » ? Je voudrais ici me baser sur TOGAF et partir de la définition suivante :
« L’architecture est la description formelle des composants essentiels d’un système, de leurs relations entre eux ainsi que les principes et directives concernant la conception et l’évolution du système. »
Au sein d’une entreprise, plusieurs types d’architectures entrent en jeu. L’image suivante illustre les types d’architecture courants, de l’architecture opérationnelle d’une entreprise à son architecture informatique en passant par son architecture de sécurité. Elle montre avant tout quels sont les composants centraux typiques de ces différentes architectures.
Illustration 1 : Les différentes architectures dans le contexte d’une entreprise
Tous les composants pertinents de ces architectures peuvent être documentés et répertoriés sous la forme de descriptions numériques (modèles) d’architecture. Cela permet par exemple à une entreprise d’aligner son architecture informatique de manière optimale avec les besoins de l’architecture opérationnelle, mais aussi, grâce à cet alignement, de tirer un maximum d’avantages de l’infrastructure informatique. Grâce à l’inventaire de cette information, une entreprise peut réagir rapidement et de manière agile à des changements externes ou internes et évaluer les conséquences de ces derniers.
Un point important à relever concerne la deuxième partie de la définition du concept d’ « architecture » : celui-ci englobe également des principes et directives pour la conception et l’évolution du système. Ça signifie qu’un architecte doit aussi penser de quelle manière, lui ou son entreprise, peut atteindre des objectifs à long terme avec sérénité et constance sans se perdre dans l’agitation des nouvelles idées et des nouvelles technologies.
4. Transformation digitale
La digitalisation systématique d’une entreprise peut être décomposée en cinq étapes successives :
- La digitalisation des informations qui n’étaient disponibles jusqu’alors que sous forme analogique. De cette façon, les informations deviennent technologiquement plus faciles à travailler et à traiter.
- La digitalisation des objets, c’est-à-dire des choses physiques comme des machines de productions ou des produits finaux complexes (par exemple des voitures) deviennent « cognitivement enrichis » grâce à des moyens informatiques et ainsi plus autonomes (entre autres). C’est ce qu’on appelle également des « jumeaux numériques ».
- La digitalisation des tâches, c’est-à-dire des activités qui ont un fort caractère répétitif et qui deviennent ainsi beaucoup plus rapides, flexibles et fiables grâce à une automatisation globale.
- L’intégration d’exécutants, c’est-à-dire aspirer à une synergie parfaite entre les différents acteurs tout au long de la chaîne de valeur.
- Le développement de modèles opérationnels fondamentalement nouveaux afin que les tâches exécutées jusqu’alors en interne puissent être complètement déléguées à des machines ou à des organismes externes en mettant les trois premières étapes à profit.
C’est cette dernière étape – la mise en place de modèles opérationnels fondamentalement nouveaux – que l’on appelle, en définitive, la « transformation digitale ».
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Anecdote : Les deux photos sur l’illustration 2 représentent toutes deux des jeux d’échecs électroniques : à gauche, la machine analogique « El Ajedrecista » de Leonardo Torres y Quevedo construite en 1912 et, à droite, la machine digitale « Deep Blue » d’IBM construite en 1997.
Illustration 2 : L’architecture comme fondement de la digitalisation
Cet article fait partie d’une série sur le thème de l’architecture informatique d’entreprise :
- Partie 1 : L’article présent
- Partie 2 : L’architecture d’entreprise en 4 frameworks
- Partie 3 : L’architecture technologique, qu’est-ce que c’est
- Partie 4 : Les avantages de l’architecture opérationnelle