Cyberrésilience : un défi technique et stratégique

Les cyberattaques font aujourd’hui partie du quotidien numérique, et leurs conséquences peuvent mettre à mal toute une entreprise. Dans cet article, vous découvrirez pourquoi la cyberrésilience est plus qu’une simple protection informatique, quel est le rôle du leadership dans ce contexte et comment les entreprises peuvent devenir plus résistantes aux attaques.

Yves Kraft 16.09.2025

Que ce soit des fuites de données, des ransomwares ou des attaques DDoS – la question n’est depuis longtemps plus de savoir si un tel incident va se produire, mais quand. Les entreprises doivent aujourd’hui se poser la question : « À quel point une attaque va-t-elle nous affecter ? ». Mais alors que de nombreuses organisations se concentrent sur la prévention et la défense, une question centrale reste toutefois souvent ignorée : quelle est la résilience de notre entreprise en cas d’attaque ? C’est précisément là qu’intervient l’approche de la cyberrésilience – comme complément à la cybersécurité classique.

Quelle est la différence entre la cyberrésilience et la cybersécurité classique ?

La cybersécurité a pour objectif primaire d’éviter les incidents. Elle comprend des mesures de protection comme des pare-feux, le contrôle des accès ou la gestion des vulnérabilités – dans le but de reconnaître rapidement une attaque et s’en défendre.

La cyberrésilience va un peu plus loin : elle pose la question de savoir ce qui se passerait si une attaque devait avoir réussi. Au cœur de cette approche se trouve la capacité de l’entreprise à maintenir ses fonctions centrales malgré une cyberattaque, à récupérer rapidement et à apprendre de l’incident. La résilience est pensée en termes de scénarios, de récupération, de capacité d’adaptation et d’apprentissage – il ne s’agit donc pas seulement de protection, mais aussi de capacité de réaction et de survie.

Différence centrale :

Cybersécurité = prévention

Cyberrésilience = gestion de l’inévitable

Comment adopter un état d’esprit orienté sur la résilience au sein de l’entreprise

Un état d’esprit axé sur la résilience peut être développé en entreprise grâce à :

Une culture de la préparation plutôt que l’illusion du contrôle : « Nous sommes prêts » plutôt que « ça ne nous arrivera pas à nous ».

  • Sensibilisation et formation à tous les niveaux hiérarchiques
  • Implication des départements spécialisés : ils connaissent les processus critiques et doivent être intégrés aux plans d’urgence.
  • Communication et exercice : jeux de simulation, formations à la réponse aux incidents et tests de continuité des activités garantissent la sécurité et une compréhension commune.
  • Les cadres dirigeants jouent un rôle d’exemple : ceux qui parlent ouvertement des risques et définissent clairement les responsabilités influencent durablement la réflexion axée sur la résilience.

La cyberrésilience concerne toute l’entreprise

Les cyberattaques concernent les processus, les humains et les décisions – pas seulement les systèmes. La résilience est ainsi une tâche transversale, comparable à la gestion des urgences ou des crises. Une attaque par ransomware ne paralyse pas seulement les serveurs, mais souvent aussi toute la chaîne logistique, la communication et le service client.

Les services spécialisés sont les mieux placés pour savoir quels processus sont critiques pour le système et comment passer en mode de fonctionnement d’urgence.

Les RH, le service juridique et la communication jouent un rôle central dans la réaction aux incidents (par exemple, en cas d’infractions liées aux données ou de communication de crise).

La sécurité informatique seule ne suffit pas

La sécurité informatique n’empêche pas tout – la résilience permet de limiter les dégâts et d’assurer une reprise rapide de l’activité. Les attaques deviennent de plus en plus complexes : ingénierie sociale, exploitation de failles zero-day et attaques contre la chaîne d’approvisionnement contournent les mesures de sécurité techniques mises en place. Les erreurs, initiés et risques tiers ne peuvent pas être complètement sécurisés par des mesures techniques. Même avec une mise en œuvre technique parfaite, il subsiste un risque résiduel – et celui-ci doit être organisé, entraîné et assumé.

À qui incombe la responsabilité de la cyberrésilience dans une entreprise ?

Les organisations performantes misent souvent sur des équipes interdisciplinaires de résilience ou des cellules de crise aux rôles clairement définis. La responsabilité est partagée, mais doit être clairement désignée :

Le C-level (CEO, CFO, COO) assume la responsabilité stratégique globale – la résilience fait partie de la continuité des activités.

Le CISO / responsable informatique est responsable des composants techniques et des plans d’urgence.

Les départements sont responsables de leurs processus critiques et de leurs plans de reprise.

La gestion des risques / gouvernance assure l’intégration dans la gestion globale des risques.

Comment intégrer des mesures de cyberrésilience à la gestion des risques ?

Les mesures de cyberrésilience peuvent être intégrées à la gestion des risques en complétant l’analyse classique des risques comme la Business Impact Analysis (BIA) en tenant compte des processus informatiques et d’analyses basées sur des scénarios, par exemple sur les ransomwares, les attaques DDoS ou le vol de données. Les risques sont classés en catégories comme interruption d’exploitation, dommages à la réputation ou risques de type légaux. Les plans d’urgence et de reprise devraient être répertoriés comme mesures de contrôle dans le catalogue des risques et les KPI et KRI pertinents définis, par exemple, le temps moyen de récupération, les taux de formation ou le nombre de plans d’urgence testés. Ce qui est important, c’est que la résilience ne soit pas comprise seulement comme un risque informatique, mais comme risque stratégique au niveau de l’entreprise.

Les mesures techniques et stratégiques de renfort de la cyberrésilience

Les mesures techniques les plus efficaces :

  • Segmentation du réseau et zero-trust
  • Stratégies de sauvegarde (testées régulièrement)
  • Surveillance et détection (p. ex. SIEM, EDR)
  • Incident Response Automation
  • Systèmes redondants et cloud failover

Mesures stratégiques :

  • Plan de gestion de crise & Business Continuity Management (BCM)
  • Concepts de communication en cas d’incident
  • Responsabilités et équipes d’urgence
  • Jeux de simulation et exercices sur table
  • Programmes de sensibilisation

Une combinaison de ces deux mondes rend les entreprises robustes et adaptables. L’Office fédéral de la cybersécurité (OFSC) offre une bonne compilation de ces thèmes.

La cyberrésilience est-elle mesurable ?

Pour mesurer la cyberrésilience, on utilise des modèles de maturité reconnus (Maturity Models), comme le NIST Cybersecurity Framework, ISO/IEC 27001 et 22301, BSI 200-4.

De plus, il est possible de tester la résilience à l’aide d’analyses d’écarts basées sur des normes de résilience définies et la réalisation de simulations et de tests de pénétration.

Il est important de définir des indicateurs clés de performance (KPI) et des objectifs en matière de cyberrésilience :

  • Temps de redémarrage des systèmes critiques
  • Temps nécessaire pour détecter une attaque (MTTD)
  • Niveau de formation et de sensibilisation
  • Nombre de plans d’urgence testés avec succès

La résilience n’est pas absolue, mais un processus d’amélioration continue – les mesures permettent ici un bon contrôle pour un développement ciblé.

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Auteur / Autrice

Yves Kraft

Suite à un apprentissage d’informaticien dans l’administration publique, Yves Kraft travaille comme System Engineer pour une entreprise de services informatique, active entre autres dans le domaine de la finance et de l’administration. Il devient ensuite System Administrator dans une grande université suisse et poursuit, en cours d’emploi, des études d’informatique à la haute école spécialisée bernoise de Bienne où il se spécialise dans la sécurité informatique. Yves Kraft est actif depuis 2011 en Penetration Testing et en Security Consulting chez Oneconsult ainsi que dans le domaine de l’enseignement. De plus, il devient Team Leader en 2013. Il est titulaire d’un BSc en Computer Science de la haute école spécialisée bernoise, possède de nombreuses certifications OSSTMM telles que Professional Security Tester (OPST), Professional Security Analyst (OPSA), Professional Security Expert (OPSE) et est également formateur OSSTMM.