La collaboration avant l'efficacité
Dans le monde du travail, l’efficacité est la grande conquête de la modernité. Grâce à la bande transporteuse, Ford a pris la tête du marché automobile. L’image de la “machine” a influencé la forme de nos organisations ces cent dernières années. Maintenant, il est temps qu’un nouveau paradigme se mette en place.
L’efficacité est la grande conquête du monde du travail d’aujourd’hui. Grâce à la bande transporteuse, Ford a pris la tête du marché automobile. L’image de la “machine” a influencé la forme de nos organisations ces cent dernières années. Maintenant, il est temps qu’un nouveau paradigme se mette en place.
Le rapport McKinsey de janvier 2018 décrit les “5 caractéristiques des organisations agiles”. C’est quelque chose que Laloux avait déjà établi en février 2014 dans Reinventing Organizations : beaucoup de nouvelles entreprises qui réussissent fonctionnent comme un organisme vivant. Si nous avons employé jusqu’à présent la métaphore de la voiture de course pour nos entreprises, il vaudra désormais mieux parler de cellules, d’âme, de perception, de sensation et de réaction. Les nouvelles entreprises n’empruntent pas toujours le long détour qui passe par le néocortex. Souvent, des décisions rapides basées sur l’intuition ou les émotions sont préférables. Et il faut apprendre à prendre ce genre de décisions.
Il s’agit de donner la priorité aux communautés de travail à résultats ouverts plutôt que de donner la priorité à l’efficacité pour remporter un avantage concurrentiel décisif.
Les revers de l’efficacité
Les machines efficaces sont faites pour exécuter des tâches précises et fixes, toujours mieux, toujours plus vite. Nous sommes particulièrement doués pour toujours faire la même chose de mieux en mieux. Cependant, cela a deux inconvénients majeurs :
- L’efficacité est le plus grand ennemi de l’innovation
Ce qui est nouveau est le résultat d’erreurs, d’échecs et d’expérimentations. Or, ces pratiques sont extrêmement inefficaces. En nous concentrant sur le gain en efficacité, nous renforçons le statu quo. - L’être humain est curieux par nature
L’efficacité relève des machines. Ce n’est pas en étant obsédés par l’efficacité que nous gagnerons les cœurs de nos collaboratrices, collaborateurs, clientes et clients. Cela a des conséquences : 70 % des personnes employées se soucient peu de leur entreprise, notre clientèle n’est pas fidèle et nous ne trouvons pas de nouveaux talents.
La nouvelle priorité : les communautés de travail
Pour mettre l’homme à la place de la machine au cœur de notre paradigme, nous devons nous fonder sur une nouvelle orientation pour guider notre action. L’étude de J. Kotter et James Heskett sur le lien entre la culture d’une entreprise et son succès se fonde sur une analyse regroupant plus de 200 entreprises. Elle montre qu’il est indispensable d’avoir des stratégies, des pratiques qui s’adaptent constamment au marché et une capacité de travail collégial pour assurer une rentabilité à long terme.
Pour cela, travailler en communauté, de manière fiable et flexible, est un élément essentiel des organisations qui réussissent. Ce qui compte le plus, ce n’est pas d’être plus rapide, ni de définir des stratégies impliquant l’efficacité et “le meilleur”, mais la manière de réagir face aux nouveaux défis et de se réorienter constamment avec aisance.
L’essence d’une bonne communauté de travail
L’esprit d’une communauté de travail peut être défini comme un “engagement complet de la part de personnes motivées et partageant un objectif commun”. C’est profondément humain et naturel pour les hommes de bien travailler ensemble et d’avoir ensemble des performances élevées. Il suffit de le permettre. Nous sommes par nature curieux, créatifs, nous aimons découvrir et nous avons besoin d’interactions, de chaleur et d’espace pour nous développer. C’est pour cela que nous ressentons le besoin de faire partie d’un groupe et de quelque chose qui dépasse notre individualité. Dans sa vidéo RSAnimate, vue plus de 16 millions de fois, Dan Pink résume ce qui motive les êtres humains : Autonomie, Maîtrise et But.
Pour bien travailler en communauté, il faut avoir assez d’espace pour travailler de manière autonome, se développer et évoluer par soi-même, pour devenir vraiment bon dans ce que l’on fait et avoir la possibilité de faire sens grâce à son activité. La Radical Collaboration est un exemple d’approche pour refonder le travail en commun.
Un nouvel ICP : la confiance
Si nous voulons bénéficier du potentiel de tous nos collaborateurs, il faut que chacun puisse se sentir libre d’apporter sa contribution. Nous avons besoin d’espaces sûrs, de “safe spaces”, de lieux dans lesquels nous pouvons nous confier mutuellement nos idées les plus folles, sans courir le risque de se sentir ridiculisé, pas écouté ou dévalorisé pour avoir dit quelque chose d’absurde.
Ce qui lubrifie les rouages du “travailler ensemble”, c’est la confiance.
À partir du moment où nous pouvons nous reposer les uns sur les autres, des “safe spaces” se créent spontanément lorsque nous partageons et défendons les mêmes principes et valeurs. Une communication cohérente, une culture attentive aux réactions et aux suggestions, et le fait de considérer toutes les contributions comme des occasions d’apprendre, sont les bases d’une culture d’entreprise fondée sur la confiance. Et c’est seulement grâce à la confiance que nous osons relever le défi de l’adaptation permanente face au risque de l’échec.
De même, lorsque nous voulons savoir si nous sommes prêts pour le nouveau paradigme d’une organisation vivante, curieuse, en évolution constante et toujours en situation d’apprentissage, il nous faut être capables de ressentir la confiance. Pour cela, il faut oser le dialogue, l’émotion, observer avec attention la communication et les réactions, encourager constamment les suggestions et les réactions, donner à chacun assez d’espace. Ceux qui réussissent créent des espaces sûrs pour chacun et les défendent si nécessaire.
Cohérence et valeurs
Les valeurs agiles comme la concentration, l’engagement, le courage, l’ouverture d’esprit et le respect sont une bonne base pour la confiance lorsqu’elles sont mises en pratique. Simon Sinek compare la création de confiance avec la question “Do you love your wife?!”.
Comme l’amour, la confiance n’apparaît pas instantanément, c’est un résultat qui s’acquiert grâce à un comportement constant sur la durée. Comme l’écrit Baki Ung sur son article sur la culture de Digicomp : “La confiance, c’est comme la porcelaine : il faut de la patience et du temps pour la fabriquer, c’est beau à regarder et agréable au toucher, elle se casse facilement, il faut beaucoup d’efforts pour recoller les morceaux et ce n’est plus jamais comme avant.”